Débris d'Haïti...
Humeurs et états d'âme d'une "petite main" de l'Humanitaire
lundi 19 septembre 2011
Haïti, c'est fini
C'est la victoire des cartographes, des bureaucrates purs et durs et des statisticiens d'avoir installé dans les moeurs l'illusion d'une géographie unitaire et d'une réalité facilement mesurable désignant d'un seul nom, ici Haïti, ce qui est morceaux, fragments, aspérités et disparités.
C'est la victoire des occupants, complexe humanitaro-militaire , d'avoir installé dans les coeurs et les esprits l'illusion qu'Haïti n'était qu'un jolie brin de pute, toujours disposée à se faire culbuter anyway.
Je suis vulgaire.Je te choque.
Pourtant. C'est la réalité de l'échec humanitaire qui devrait te choquer, t'indigner tant elle est vulgaire et sale, cette vérité là.
Même si, je sais bien, je sais bien, je devrais être bien placé pour être plus équilibré et raisonnable, je sais bien, ce complexe est plus complexe que le vernis; mais les faits sont têtus et je suis bien obligé de constater qu'une proportion infime de nos fonds a fini dans le fonds, dans la structure des choses et non dans l'écume des jours.
On ne photographie pas un pays; mais des photos peuvent être des ouvertures, des saillies, des brindilles sur le pays en forme de fragments. Pour donner à voir, justement, que l'on ne voit, que d'infimes parcelles, de toute la vie à voir.
Voila ce que fait l'ami Jean François. Il va nous manquer, le bougre.
Quant à moi, je vais me consacrer à...l'écriture (papier) et à mes chats (bottés).
Et reviendrai, humain, vite, auprès de mes chers humains.
Merci de m'avoir suivi, du coin de l'oeil.
La vérité est ailleurs:
« Ou mande m cheri sa poyezi vle di ?
…Oun bann ti fraz pou chavire malè. »
Tu me demandes, chérie, ce que la poèsie veut dire ?
…Une série de petites phrases pour faire chavirer le malheur. »
lundi 11 juillet 2011
dimanche 24 avril 2011
La défroque
C'est pas parce qu'on passe ses jours fériés de "Semaine sainte" chez le "moderne", dit-on, voisin dominicain, en bon ONGien/MINUSTAH de base, au milieu des vapeurs de mojitos et des déhanchés audacieux de merengue, qu'on peut pas continuer à lire du bon gras, du bon gros auteur haïtien du 20ème siècle.
Price Mars, même, qu'il s'appelle, le grand bonhomme.
Et en 1927, il tenait peu ou prou ce fuckin language...
"Par un paradoxe déconcertant, ce peuple qui a eu, sinon la plus belle, au moins la plus atachante, la plus émouvante histoire du monde-celle de la transplantation d’une race humaine sur un sol étranger dans les pires conditions biologiques- ce peuple éprouve une gêne à peine dissimulée, voire quelque honte, à entendre parler de son passé lointain. C’est que ceux qui ont été pendant quatre siècles les partisans de la servitude noire parce qu’ils avaient à leur service la force et la science, ont magnifié l’aventure en contant que les nègres étaient des rebuts de l’humanité, sans histoire, sans morale, sans religion, auxquels il fallait infuser n’importe comment de nouvelles valeurs morales, une nouvelle investiture humaine.
Et lorsque à la faveur des crises de transmutation que suscita la Révolution française, la communauté d’esclaves de Saint Domingue s’insurgea en réclamant des titres que personnes jusque là ne songeait à lui reconnaître, le succès de ses revendications fut pour elle tout à la fois un embarras et une surprise –embarras inavoué d’ailleurs, du choix d’une discipline sociale, surprise d’adaptation d’un troupeau hétérogène à la vie stable du travail libre.
Evidemment le parti le plus simple pour les révolutionnaires en mal de cohésion nationale était de copier le seul modèle qui s’offrit à leur intelligence. Donc, tant bien que mal, ils insérèrent le nouveau groupement dans le cadre disloqué de la société blanche dispersée, et, ce fut ainsi que la communauté nègre d’Haiti revêtit la défroque de la civilisation occidentale au lendemain de 1804. Dès lors, avec une constance qu’aucun échec, aucun sarcasme, aucune perturbation n’a pu fléchir, elle s’évertua à réaliser ce qu’elle crût être son destin supérieur en modelant sa pensée et ses sentiments, à se rapprocher de son ancienne métropole, à lui ressembler, à s’identifier à elle. Tâche absurde et grandiose ! Tâche difficile, s’il en fût jamais !
Mais c’est bien cette curieuse démarche que la métaphysique de M de Gaultier appelle un bovarysme collectif, c'est-à-dire la faculté que s’attribue une société de se concevoir autre qu’elle n’est"…
dimanche 3 avril 2011
Les Haitiens sont des Africains (ou pas)
Jusqu’ici, chaque fois qu’il s’est agi de tenter de justifier rationnellement ce vif sentiment d’altérité culturelle donné par Haïti, on a régulièrement fait appel à l’Afrique. Apparemment non sans raison, d’ailleurs, l’aspect physique des haïtiens favorisant à coup sur ce type de rapprochement : deux noirs faisant des choses différentes ne se ressemblent ils pas suffisamment en tant que noirs, pour que des esprits imprécis ou chimériques puissent être amenés à transférer sur ce qu’ils font la similitude de ce qu’ils sont, au point de conclure de bonne foi qu’ils sont deux choses identiques ?
Florilèges es MINUSTAH, et pas des militaires hein, plutot des civils grassement payés pour..."aider" le pays, glané ces derniers mois:
"Bwana is bwana, non, après tout?"
"Me rappellent la nonchalance et désorganisation africaine...Exactement pareils...Je sais qu'on a pas le droit de parler de races avec les UN, universalité et tout le bla bla...mais quand même, c'est frappant..."
"Quand on voit ce que fait la République dominicaine, juste à coté...La propreté, les malls et tout, on se dit que bon, ils ont pas eu le même héritage ces peuples, ni le même...Bon, ils viennent d'Afrique quoi".
Oui, je sais, les bras m'en tombent à chaque fois.
Allez, oui, c'est tout pareil. Ayiti= Africa...
De plus, le rapprochement n’est pas que visuel : nul n’ignore en effet que les ancêtres des haïtiens ont réellement été amenés d’Afrique. Il s’ensuit que si l’on n’est pas trop scrupuleux sur l’utilisation de l’argumentation historique, et si de surcroit l’on entretient de la culture une conception essentiellement conservatrice et défensive (ce qui est le cas de beaucoup d’ethnologues, qui aiment voir la culture comme un capital dont l’histoire arracherait méchamment des lambeaux à ceux qui la détiennent), nombreux sont ainsi ceux qui se sont laissés entrainer à soutenir qu’au terme d’une histoire qui ne fut pas, particulièrement tendre à leur égard, les haïtiens se caractériseraient par le fait qu’ils seraient parvenus à conserver envers et contre tous, un certain nombre d’éléments de cette culture africaine, à laquelle s’accrocherait leur « identité ».
Et chacun de faire état, en guise d’arguments, de quelques dizaines de « survivances », souvent improuvables, quelques fois improbables, et toujours d’ordre purement anecdotique ou lexical, afin de fonder sa conviction de l’africanité fondamentale de la culture haïtienne. L’ennui c’est que l’africaniste, et a fortiori l’africain, qui considère Haïti avec l’œil du comparatiste, n’y retrouve jamais l’Afrique, si ce n’est dans des traits d’une généralité telle qu’ils pourraient s’appliquer tout aussi bien à toute autre partie du monde.
Ainsi, à moins de considérer par exemple que la danse, la transe, les tambours, la sorcellerie et l’organisation lignagère appartiendrait en propre à l’Afrique – et donc qu’il conviendrait de voir de l’africanité chaque fois qu’on les rencontre quelque part : comme en Sibérie par exemple) , il faut bien se rendre à l’évidence : Haïti n’est reconnaissable en tant qu’africaine que par l’origine physique de sa population.
Si l’on considère ce que fit réellement leur trajet historique, il n’y a pourtant rien d’étonnant à ce que les africains transplantés il y a deux siècles soient devenus aujourd’hui étrangers aux cultures africaines. En effet sur le plan culturel tout fut fait, à l’époque de la traite et de l’esclavage, afin de déboussoler culturellement les malheureux qu’on amenait du continent noir. De la part de ceux qui en prenaient l’initiative, cette entreprise de destruction culturelle répondait à des intentions d’efficacité et de sécurité ; et leur action rencontra d’autant moins de résistance dans le monde des esclaves qu’essentiellement fondées sur le lignage-donc sur la référence à un sol autant et en même temps qu’à un univers parental- les cultures africaines particulières étaient mal faites pour survivre à l’exil, et aux brassages de populations que pratiquaient systématiquement les négociants et les planteurs.
Si bien qu’intentionnellement « dégrammaticalisé » sur le plan linguistique aussi bien que social, l esclave venu d’Afrique-appelé bossale une fois arrivé à Haïti-ne disposait donc plus, pour communiquer avec ses compagnons d’infortune, que des moyens offerts par la seule langue du maitre, et par l’organisation même du système de traite et de plantation. parachevait ceci le fait que le statut de l’esclave créole (né à la colonie, baptisé, parlant la langue du maitre, et s’intéressant déjà aux moyens de son affranchissement) constituait le point oméga de l’ univers de l’esclave. A cet égard, le mépris que l’esclave créole manifestait envers le bossale enseignait clairement à ce dernier que la conservation de conduites culturelles africaines était ce qu’il y avait de plus contre indiqué non seulement pour sa survie immédiate et pour sa bonne adaptation dans le système de plantation mais aussi, sur le long terme, pour ses espérances de mobilité sociale à l’intérieur de la société esclavagiste.
samedi 12 mars 2011
Monsieur le Ministre
- Mais qu’est il arrivé au Vice Ministre, qui a disparu si..soudainement, Mr le Ministre ?
-La vengeance populaire? Un suicide? Sans doute l'un, ou l'autre. Nous ne saurons probablement jamais. Les gens de ce quartier de Martissant, Port au Prince, étaient très décus de l’absence d’eau. Il avait promis cette pompe. Sans parler de sa mauvaise gestion de la crise du choléra, par ailleurs...Nous autres, Mister Philip, nous savons nous débarrasser de nos tyrans et de nos tricheurs. N'est-ce-pas Mr Herman? Expliquez à votre ami un peu comment nous fonctionnons dans ce pays, avec les dirigeants qui ont failli...
Et de partir sur un rire gras, que j'interprétai (sans doute à tort, car nous n'en n'étions pas l'objet), comme bien trop lourd de menaces.
-Mais la pompe à eau va fonctionner maintenant, demanda, toujours très pragmatique, décidémment, ce freshman, nouveau débarqué, de Mr Philip ?
-Ce sera l’un de mes premiers soucis, je vous l'assure.
D’un geste de la main, il désigna les dossiers qui étaient derrière lui.
-Mais comme vous le voyez, j’ai beaucoup d’affaires.
Je remarquai que les agrafes d’acier qui attachaient ses affaires avaient été couvertes d’une rouille par une succession de saisons des pluies : une affaire prenait définitivement longtemps à se régler en Haiti.
Il alignait toute une rangée de petites croix sur sa feuille : rien que des signes plus.
Plus. Plus.
- Vous diposez de gros capitaux, j’en suis sur, poursuiva-t-il, Mr Philipp.
- J’ai pensé à une association mutuelle avec le gouvernement, pour ce centre, oui.
- Naturellement, vous comprenez, Mr Philip, que nous ne sommes pas un état socialiste. Nous croyons à la libre entreprise. Le travail de construction serait mis en adjudication. J'imagine que votre ami, mon cher Herman, ici présent, vous avait déja évoqué cette possibilité. Car ainsi sont les procédures. N'est ce pas, Mr Herman?
-Euf, enfin...
- En tout cas, ce sera donc parfaitement dans les règles...Donc cela nous convient, m'interrompit Mr Philipp.
- Il va de soi que le gouvernement déciderait, en dernier ressort, entre les adjudicataires. Ce n’est pas une simple question de l’offre la plus basse. Il faut considérer…beaucoup de paramètres. Et naturellement les questions sanitaires prennent la première place. Pour cette raison, je pense que votre projet doit dépendre avant tout du Ministère de la santé publique.
- Magnifique, je traiterai donc avec vous.
- Plus tard nous discuterions bien entendu avec les finances. Et le Plan. Et les mairies, et CASEC. Et les douanes. La responsabilité des importations lui incombant, comme de bien entendu.
- Il n'y a pas de taxes sur les projets humanitaires de ce type, j'imagine, Mr le ministre? ?
- Quelques broutilles, Mr Philip, oui, car rien n'est gratuit en ce bas monde, isn't it? Et c'est bien votre pays qui me l'a enseigné. t je lui dois beaucoup. Nous parlerons de cela plus tard, si vous le voulez bien. Il y a d abord la question du terrain ; et de son prix.
- Le gouvernement est disposé à faire un don ? Considérant notre investissement en main d œuvre, l'utilité de ce Centre pour le Bien Public, ou Common Good comme on dit chez nous...
- La terre n’appartient pas au gouvernement mais au peuple, Mr, dit le ministre sur un ton d’indulgent reproche. Tout de même, vous constaterez que rien n’est impossible dans notre pays, malgré tous ses problèmes dus surtout à une catastrophe naturelle majeure. D'ailleurs, vous verrez bien les japonais, ils auront les mêmes difficultés très bientot, vous verrez, s'égara-t-il un instant, dans une de ces analogies foireuses sont les ministres haitiens sont friands...Je suggérerai, en tout cas, un apport de capitaux pour l’emplacement équivalent au cout de la construction.
- Mais ce serait absurde, les deux n’ont aucun rapport.
- Remboursable, bien sur, à la fin des travaux.
- Cela signifie que l’emplacement serait gratuit, au final ?
- Entièrement gratuit.
- Alors je ne vois pas à quoi sert cet apport de capitaux.
Je commençai alors à ma diluer dans mon siège, à m'évaporer littéralement, par fatigue, agacement et rage d'assister une fois de plus à ce type de hold up insitutionnel, en douceur, de la part de l'ancien premier ministre...Lui qui roule dans un hummer dernier cri, malgré que celui ci passa péniblement les rues encombrées de débris post-séisme de la capitale...
-Cet apport sert à protéger les ouvriers, Mr, voyez-vous. Beaucoup de projets étrangers ont connu une fin soudaine et le travailleur haitien n’a rien trouvé dans son enveloppe le jour de la paye. Accident tragique pour une famille pauvre, rendez-vous compte. Et comme vous, les pauvres sont notre priorité ! Nous avons beaucoup de pauvres, comme vous le savez. Cela compte...
- Alors, que diriez-vous d'une garantie bancaire ?, osais-je, souhaitant secourir ce Mr Philip, lui qui m'avait demandé mon entremise pour obtenir ce rendez-vous, rien de plus...Mais que je ne pouvais pas abandonner aux Pirates de Caraïbes de cette façon...Sans donner un peu le change, au moins, une sorte de mini baroud, pour la forme, car nous savons bien comment tout cela finit...
- Le Paiment Comptant est une notion meilleure. Le dollar a connu des variations, pas notre monnaie, La Gourde. Ce sera bien. En gourdes.
- Il faut que j écrive à mon comité aux US, mon Board of directors et...
- Ecrivez donc, et dites leur que nous accueillons tous les projets progressistes.Et le gouvernement fera tout ce qu’il pourra.
Il se leva de son siège en cuir véritable pour signifier que l’interview était terminée, et le large sourire que je qualifierai plus tard de carnassier montrait qu’il espérait que cette rencontre serait profitable aux deux parties.
Expert redoutable de ces choses là, il passa même ses bras autour de Mr Philip, ce collègue d'une importante agence US, d'une rare candeur, pour bien montrer qu’ils étaient associés dans la grande œuvre du progrès.
- Et l’emplacement, essaya-t-il?
- Il y en a plein, no worry... Pagen pwoblem. Tabarre, Carrefour, Corail, plein.
Dans le 4x4 officiel, Mr Philipp, s'adressant à moi en anglais:
-Merci Herman, pour ce rendez vous. Cela faisait 4 mois que...Merci. Il a l’air très intéressé. I am very satisfied, excellent meeting!
-Je me méfierais juste, à votre place, à propos de cet apport de capitaux. Si je puis me permettre...
-Mais, il est remboursable!
-Oui, une fois les travaux finis. Ce qui, ici, n'est pas une mince affaire...
-Do not worry, you frenchy man. I feel it. I think we get it. He is a nice man, I trust his background...He is one of ours, tout ira bien.
De retour dans mon bureau, avachi, je pensai à ce livre de Graham Greene, les Comédiens, sur l'Haiti duvallieriste.
Nous devenons tous des comédiens, dans cette capitale de l'aide internationale.
Et j'eus soudain une grosse, terrible, impitoyable envie de me prendre une grosse reculade alcoolisée dans un de ces bars a gringos de PAP, et de rejoindre la cohorte des jeunes et moins jeunes humanitaires qui sommes là, tous, à notre corps défendant, à tenir à bout de bras et engraisser, là, cette oligarchie rance et redoutable qui préside aux destinées de ce beau, fier et attachant pays chéwi d'Ayiti...
Clin d'oeil adapté des Comédiens...
dimanche 27 février 2011
Haïti et ses perpétuels "projets" de développement
Remplacez dans la dernière case CUSTOMER par COMMUNITY, ou juste, THESE PEOPLE, et vous aurez une idée plutôt réaliste des processus sinueux et ... de l'état ou se trouvent environ 80% (statistique non homologuée OCHA - ni ECHO - ni Coordination Sud - ni Eurostat non plus) des projets de développement qui sévissent dans le pays depuis 30 ans.
Parmi eux, une masse étonnamment brouillonne, irresponsable et foireuse de projets menés par quantité d'églises mormones, adventistes, pentecôtistes et autres puissantes chapelles, fruits amers du puritanisme pan-US militant.
Tout vol quotidien d'American Airlines en emmène d'énormes floppées, représentants es Theos de tout âge, en "mission" d'épandage d'amour au fort accent Middle West, pour une ou deux semaines de labeur "volunteer".
Leurs t-shirts sont particulièrement criards, leurs compétences proches du zéro pointé et leurs grands, imperturbables sourires autosatisfaits me font toujours un effet cataclysmique: ce doit être l'onde de choc, l'effet immédiat d'un impérialisme des bons sentiments qui aura, décidémment, toujours le don de m'effrayer dans ce qu'il recèle de plus tordu, de plus malsain et de plus dangereux chez les Missionnaires 2.0 de notre époque.
Va falloir rentrer dans le détails avec cette histoire là, qui n'a fait que s'aggraver depuis le séisme...
samedi 12 février 2011
Aristide développement
« Une persistance à mal se conduire ou une impuissance qui aboutit à un relâchement général propre à une nation civilisée peuvent rendre nécessaire à la fin, en Amérique comme ailleurs, l’intervention de quelque nation civilisée ».
Theodore Roosevelt, président des Etats-Unis, 1903
« Haïti n’a pas été, à proprement parler, une colonie française, mais nous avons depuis longtemps des relations amicales... »
Jacques Chirac, Président de la République française, Pointe à Pitre, Guadeloupe, 10 mars 2000
Autant le savoir: en plein brouille autour de l'intervention Bushiste en Irak entre les USA et la France, la collaboration franco-américaine pour faire le dirty job a fonctionné à plein, bien que très discrètement, dans de nombreux pays.
En 2004, en Ayiti, ce sont bien ces 2 pays amis qui ont pressioné, puis physiquement séquestré et "démissioné" en l'éjectant à Bangui, puis en Afrique du Sud.
Ce sont des faits. Les faits sont têtus.
Aristide étant sur le point de resurgir dans le pays, et je sens bien que c'est imminent, un petit point s'impose. La souveraineté, ici, n'a jamais été qu'un vœu pieux...Mais en même temps, Aristide, ce gâchis sur pattes devenu pion des narcos, pouvait-il rester beaucoup plus longtemps, dans ces conditions?...Les USA et la France se sont permis de répondre à cette question, il y a 7 ans.
Aristide du prophète au dictateur
LE MONDE | 08.01.2004
A 50 ans, le président haïtien, ancien prêtre des bidonvilles, paraît de plus en plus isolé, mais il s'accroche au pouvoir, avec le soutien des milices.
Jean-Bertrand Aristide rêvait d'être le Toussaint Louverture du XXIe siècle. Le père d'une nouvelle indépendance, deux siècles après la proclamation de la première république noire. Celui qui aurait tiré les Haïtiens de leur misère pour les conduire à une "pauvreté digne". Mais le temps du rêve est terminé : nombre de ses compatriotes le comparent aujourd'hui à Jean-Claude Duvalier, le dictateur qu'il fustigeait à la fin des années 1980 lorsqu'il n'était qu'un jeune curé révolutionnaire des bidonvilles de Port-au-Prince. S'appuyant sur les "chimères", bandes armées qui ont remplacé les "tontons macoutes" des Duvalier, et jouant habilement des hésitations de Washington, "Titid", comme on le surnomme, s'accroche au fauteuil présidentiel face à la colère grandissante de son peuple.
Après avoir incarné un immense espoir de changement démocratique à la chute de la dictature des Duvalier, Aristide s'est révélé incapable d'apporter un début de solution aux maux qui rongent la société haïtienne. Depuis son irruption à la tête de l'Etat, il y a treize ans, le pays le plus pauvre des Amériques a continué de s'enfoncer dans la crise.
Par ses atermoiements, ses promesses non tenues, la communauté internationale porte sa part de responsabilité dans cet échec. Mais, en s'opposant au renforcement des institutions, en confortant l'image d'un président omnipotent et messianique, en recourant aux vieilles recettes latino-américaines du clientélisme, de la corruption et de la violence extrajudiciaire, Aristide lui-même est le grand responsable du désastre.
Ceux qui l'ont porté au pouvoir, en 1990, les idéalistes qui communiaient avec lui dans la théologie de la libération, ont été parmi les premiers à dénoncer en lui la graine de dictateur. Mais la soif de pouvoir absolu, l'incapacité de négocier honnêtement n'ont rencontré au départ que peu d'obstacles.
Les journalistes de la radio haïtienne, les intellectuels et quelques hommes politiques courageux ont d'abord dénoncé les dérives du régime. Puis la société civile, les étudiants et la grande masse de la population ont pris le relais. Retranché avec sa famille dans son imposante résidence de Tabarre, dans la banlieue de la capitale, sous la protection de gardes du corps américains, ne se déplaçant qu'en hélicoptère, "Titid" s'est coupé du petit peuple, qui voyait en lui un prophète. Sans jamais élucider l'origine de sa fortune.
Pour la suite, c'est là.
lundi 7 février 2011
Tyranosaurus populis
Aujourd'hui, à Port au Prince.
Aujourd'hui, le président Préval devait finir son 2ème mandat, en accord avec la Constitution et son avocat, et partir se reposer à Miami, en ligne avec une longue histoire et tradition régionale.
Aujourd'hui, l'avocat d'Aristide est venu en avion de ligne, depuis Miami, histoire de récupérer son passeport diplomatique délivré en accord avec la Constitution, en désaccord avec la notice d'Interpol, la justice et le bon sens, en symbiose avec, là aussi, une très ancienne tradition régionale.
Aujourd'hui Baby Doc Duvallier a repris du baba au rhum.
2 fois.
....soupirs....
Aristide bientôt de retour, inévitablement.
Baby Doc qui pavanne dans les restaurants de Petionville.
(Remarques, ca ferait une bonne idée de "Ultimate fighter", façon lucha libre du Mexique, entre ces deux Tyranosaurus populis.
Preval en arbitre. Et le candidat malheureux, éjecté, Jude Celestin, en coupeurs d'orange. Manigat, la candidate, qui fait passer les pancartes affichant les rounds, en bikini de..sous la musique de Sweet Mickey l'autre candidat du 2eme...STOP.)
Et à peine 200 manifestants aujourd'hui, quelques pneus et caillasses balancées. Cela suffit pour que la moitié des ONG demandent à leur staff de regagner leurs bases/villas retranchées, dans un repli préventif ridicule...
On nous aurait, moqueurs, évoqué cette farce improbable il y a encore un mois que...
Non décidément, le réalisme magique et biscornu, ce n'est pas que pour les pays plus au Sud.
Les vieux exilés, eux, ne seront qu'à moitié surpris...
« Disons seulement, qu’en dépit du départ des Duvalier, les politiques mises en ouvre depuis 1986, à de rares exceptions près, ressemblent à s’y méprendre à celles inaugurées par François Duvalier et conduites par son fils Jean-Claude sous la houlette de conseillers variés. Le pathétisme de cette situation vient du fait que, malgré le précipice que frôle le pays, nos compatriotes n’arrivent pas à discuter sincèrement autour d’une table et ne paraissent pas décidés à trouver un terrain d’entente minimum. Nous espérions tourner la page des Duvalier et de leurs méthodes de gouvernement, nous sommes obligés de constater aujourd’hui que rien n’a véritablement changé. »
Jean Metellus
dimanche 30 janvier 2011
Infortune
Galettes de boue, made in Cité Soleil, bientôt disponible au Quartier Latin, Place Boyer, Petionville. So authentique...
Papa chanteur, maman douceur, pleures pas bébé bonheur…
Papa colon, Maman esclave, pleures pas bébé malheur…
Je suis tombé sur un vieux camarade, un de ces vieux routiers de l’humanitaire l’autre jour, que je n’avais pas revu depuis l’époque estudiantine. C’est dire si ça remonte…Je devais même avoir encore les idéaux chevillés au cœur comme au corps, encore, à cette époque. C’est dire...
Idéaux que je porte désormais en bandoulière, prêt à les brader au tout venant voire au petit vent, et que je laisse volontiers à l’entrée du Quartier Latin, tel un petit parapluie, le jeudi soir, ou à l’entrée d’un de ces compounds luxueux, villas louées à prix d’or par de nombreuses ONGs internationales, le vendredi ou samedi soir, lors de ces fameuses NGOs parties si courues, histoire de bramer et de mi-pogotter piteusement avec les autres djeunss « militants-mercenaires » humanitaires sur Nirvana ou Stromae…Mais quoi, rétrograde aigri, les gens ont le droit de s’amuser après tout non ? Quoi ? L’odeur de pisse et la vue des tentes délabrées au sortir de ces défouloirs à paillettes devraient nous gêner ? Ce serait indécent, ce qui est dépensé lors de ces mi-orgies très private ? Tss tss tss, vous avez l’esprit mal tourné…Et puis les DSA, per diem et autres bonus sont aussi faits pour ça non?
Bref, ce camarade de jeu, bavard et sûr de son sujet (le bougre vit ici depuis plus de 10 ans, qui plus est maqué, doublé de papounnet), mais plutôt devrais-je dire prolixe et pertinent, en contraste avec le verbiage pompeux-à côté de la plaque qu’on m’a servi de ci de là tout au long de cette année 2010, me résuma la psyché et Weltanschauung/conception du monde haïtienne en ces quelques mots:
« Haiti, vois-tu, mon chew, est un enfant qu’on a abusé, maltraité, violé, et à qui on n’a jamais pris le temps, trouvé les mots justes, pour lui dire que ce n’était pas sa faute…Et que tout ira mieux». Il l'a sans doute dit cela bien mieux encore, et sans une once de paternalisme. C'était drôlement convainquant, tendre, lucide et délicat.
"En même temps, rajouta-t-il, s'ils veulent te niquer, ils le feront, et tu ne t'en rendras compte que trop tard...Part of the game, partné'w".
Voila qui me laissa songeur.
Je n’ai pas écrit depuis le soir des résultats du premier tour, début décembre, car, en passionné de la chose politique, tout ce qui se trame ici depuis, vois-tu, est par trop déprimant. Plus envie de parler d’autres choses. Et Dabadie, ce grand herboriste de l'Haïti contemporaine, en parle mieux que personne. Allez donc le voir: une petite dose, chaque jour, en sachet de 2...
Que se passe-t-il dans la galaxie humanitaire?
Tout, et rien, pourtant.
Aout, rapports soignés mais durs et articles critiques de partout sur la réponse humanitaire: tout va bien, selon l’UNICEF et le PNUD,
Septembre, tempête tourbillonante qui met 20 000 tentes par terre, tout va bien selon l’OIM,
Octobre, cyclone Thomas, mais tout va bien, selon OCHA,
Novembre, irruption et propagation du choléra, élections surréalistes, tout va bien selon la MINUSTAH -heureusement que MSF est là.Et les docs Cubains.
Décembre, violences post-électorales, barricades fumantes dans une capitale paralysée, tout va bien, selon Jude Célestin, et l'OEA.
Janvier, retour de Baby Doc Duvallier, tout va bien, épiphénomène, selon les autorités, les américains, les français.
Janvier, 12 janvier, tout va bien, larmouilles de rigueur pour les 109 UN tombés, jour anniversaire, unb an après: les rapports auto-satisfaits en papier glacé sont de sortie, plus indécents les uns que les autres.
Tiens, les abris sont passés de 16 000 à 31 000 en 2 semaines. Tiens, le WFP/PAM est passé dans son bilan de 2,3 millions de personnes ayant reçu des rations alimentaires à 4 millions. Tiens, on est passé de 5% de débris enlevés à 20%. Miracles délicieux de la Nativité, merveilleux Noël...
Mensonges, mensoooooooonges, simples à démontrer qui plus est. Face à ce discrédit, je me demande ou sont les watch dogs sérieux, les auditeurs de cette mascarade marketing? Des excés de la professionalisation de l'humanitaire...
Nous sommes parasités par des communiquants, des marketters, des bonimenteurs de merde.
Laissez-nous travailler, faire et faire avec pédagogie, faire avec et pas à la place de, plutôt que de subir ce mauvais ragout de manipulation, dissimulations grotesques; mentir, encore et encore...UNICEF, Care, PAM, Handicap International, menteurs! Vos plaquettes "Un an après" sont des tissus de bullshit. Cut the fuckin crap, now!
Bon. Une dose de Dabadie. Je me contrôle. Il est si apaisant, ce gars.Cette capacité à poétiser le réel sordide, merde alors...
Bon, reprenons.
Aussi complexes que préoccupantes, ces situations de "merdier structurel", de sous développement, de blocage total dans le pays, semblent décourager beaucoup de ceux qui jusqu’ici s’efforcaient de les comprendre, comme si chez eux la démission de l’intellectuel ou du professionnel engagé emboitait le pas à l’écoeurement des sentiments devant l’architecture d’iniquités, tant internes qu’externes, dans laquelle ces situations sont bâties.
Certes nous avons tous compris que l’heure n’est plus aux jérémiades ni aux apologétiques culpabilisantes, et que d’ailleurs les exagérations du tiers mondisme n’ont pas fait que du bien au tiers monde lui-même ; mais ce n’est pas pour autant que l’on doit accepter que, suite à une sorte de retour de balancier, se généralise la conviction que si les peuples dits sous développés sont maintenant dans l’état ou on les trouve, c’est aux victimes elles même qu’il conviendrait d’en imputer la responsabilité.
Soit, plus simplement, ce qu'on entend de plus en plus par ici, en ONG, Minustah ou UN agencies land: qu'ils se démerdent, à la fin, s'ils ne sont pas contents...
C'est décourageant, tout ça, oui, vraiment.
Mais de là à perdre le Nord, qui devrait être le souci de contribuer à des solutions concrètes pour les plus vulnérables, soit 85% du Peuple Haïtien, c'est, comme le chantait Francis Lalanne (et quoi, pourquoi qu'il aurait pas sa place lui aussi?), "trop, trop dommage..."
Cette extraordinaire concentration de l’infortune, sur un aussi petit territoire, Herman compte bien continuer en t'en causer, en 2011.
Reviens-donc voir Tonton Herman, il ne t'a pas oublié. Certes, il est un petit peu chafouin, fâché, il est même prêt à te casser la tronche si tu continues à l'embrouiller avec tes faux chiffres et tes conneries, mais il saura tout autant, magnanime, trouver comment te gâter...
Bref, 2011, Débris, c'est reparti.
« Ou mande m cheri sa poyezi vle di ?
…Oun bann ti fraz pou chavire malè. »
Tu me demandes, chérie, ce que la poèsie veut dire ?
…Une série de petites phrases pour faire chavirer le malheur. »
mercredi 8 décembre 2010
Soirée d'élections
Une bonne sortie du Nouvelliste...
Il est 22 heures. La télévision nationale d'Haïti diffuse un concert de Michèle Torr. Des vieux tubes sur une musique datée.
Dehors ça tire. Des brasiers de pneus enfument le ciel quartier après quartier. Michel Martelly a annulé la conférence de presse qu'il devait donner à l'hôtel Ibo Lélé. Impossible pour lui d'arriver au nid d'aigle qui surplombe la ville. Les journalistes qui ont fait le pied de grue pendant quelques dizaines de minutes ont eu le temps d'échanger sur le panorama. Port-au-Prince est en crise. La province ne se porte pas mieux.
Prévus pour 18 heures, les résultats des élections présidentielles et législatives ont été proclamés vers 21 heures. Lus par un porte-parole du Conseil Electoral Provisoire seul, perdu, dans un décor de neuf chaises vides. Il a lu tous les résultats pour le pays. Sénateurs, députés et présidents, il a donné le classsement des prétendants.
Sitôt fini, le porte-parole s'éclipse, sans un mot. Pas le temps de prendre une question. D'apporter une précision. Les journalistes se précipitent sur leurs téléphones pour rentrer en contact avec leurs médias. Le présentateur de la Télévision nationale d'Haïti bâcle un résumé pour, lui aussi, mettre fin à la retransmission.
L'atmosphère est au sauve-qui-peut. C'est visible. D'ailleurs, dès quatre heures de l'après-midi, la ville inquiète avait envie de courir, de prendre la fuite, de se terrer, de s'enfermer. D'attendre que les résultats passent. Comme pour un ouragan.
Il est 22 heures. Personne ne sait de quoi demain sera fait. Les candidats admis au second tour, ceux recalés avec l'envie de se battre et ceux qui savaient déjà que rien de bon ne les attendait le jour de la proclamation des résultats : tout le monde se tait.
Pas de responsable du CEP. Pas de voix morale. Rien. Le silence et la rumeur de la foule qui occupe les rues alimentent l'angoisse.
24 ans devant la Télévision nationale que nous attendons que les choses se passent bien et que tout finit mal. Depuis le départ de Jean-Claude Duvalier le 7 février 1986, nous attendons certains soirs que le changement nous arrive d'un coup. Et le mieux avec.
Plus de 24 ans que nous essuyons des déceptions.
Signal FM multiplie les circuits de ses correspondants. Le chaos prend forme.
L'ambassade américaine est la première à réagir, avec une note de presse publiée à 22 heures 13.
Nous sommes le 7 décembre 2010. Michèle Torr chante encore sur la TNH.
Il est 22 heures. La télévision nationale d'Haïti diffuse un concert de Michèle Torr. Des vieux tubes sur une musique datée.
Dehors ça tire. Des brasiers de pneus enfument le ciel quartier après quartier. Michel Martelly a annulé la conférence de presse qu'il devait donner à l'hôtel Ibo Lélé. Impossible pour lui d'arriver au nid d'aigle qui surplombe la ville. Les journalistes qui ont fait le pied de grue pendant quelques dizaines de minutes ont eu le temps d'échanger sur le panorama. Port-au-Prince est en crise. La province ne se porte pas mieux.
Prévus pour 18 heures, les résultats des élections présidentielles et législatives ont été proclamés vers 21 heures. Lus par un porte-parole du Conseil Electoral Provisoire seul, perdu, dans un décor de neuf chaises vides. Il a lu tous les résultats pour le pays. Sénateurs, députés et présidents, il a donné le classsement des prétendants.
Sitôt fini, le porte-parole s'éclipse, sans un mot. Pas le temps de prendre une question. D'apporter une précision. Les journalistes se précipitent sur leurs téléphones pour rentrer en contact avec leurs médias. Le présentateur de la Télévision nationale d'Haïti bâcle un résumé pour, lui aussi, mettre fin à la retransmission.
L'atmosphère est au sauve-qui-peut. C'est visible. D'ailleurs, dès quatre heures de l'après-midi, la ville inquiète avait envie de courir, de prendre la fuite, de se terrer, de s'enfermer. D'attendre que les résultats passent. Comme pour un ouragan.
Il est 22 heures. Personne ne sait de quoi demain sera fait. Les candidats admis au second tour, ceux recalés avec l'envie de se battre et ceux qui savaient déjà que rien de bon ne les attendait le jour de la proclamation des résultats : tout le monde se tait.
Pas de responsable du CEP. Pas de voix morale. Rien. Le silence et la rumeur de la foule qui occupe les rues alimentent l'angoisse.
24 ans devant la Télévision nationale que nous attendons que les choses se passent bien et que tout finit mal. Depuis le départ de Jean-Claude Duvalier le 7 février 1986, nous attendons certains soirs que le changement nous arrive d'un coup. Et le mieux avec.
Plus de 24 ans que nous essuyons des déceptions.
Signal FM multiplie les circuits de ses correspondants. Le chaos prend forme.
L'ambassade américaine est la première à réagir, avec une note de presse publiée à 22 heures 13.
Nous sommes le 7 décembre 2010. Michèle Torr chante encore sur la TNH.
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